La débâcle de 1940

La légende dorée du gaullisme voudrait que De Gaulle fut un visionnaire au milieu d’un ramassis de militaires totalement dépassés et que lui seul ait prédit l’importance des chars dans la guerre moderne mais qu’il n’aurait pas été écouté et qu’enfin dans la débâcle il aurait fait la démonstration de ses capacités et de son courage. La réalité est tout autre.

Devant la percée éclair des blindés allemands de Gudérian, le général français Gamelin est limogé et le général Weygand rappelé d’urgence de Syrie. Weygand met sur pied deux contre-offensives dont l’une couperait les troupes allemandes (trop avancées en territoire français) de leurs arrières. Mais la décision déloyale et sans préavis des anglais de rembarquer leurs troupes à Dunkerque (les anglais refuseront même aux français l’appui de l’aviation) empêche ce qui aurait pu être un retournement de situation, une nouvelle victoire de la Marne (14-18) qu’un homme de l’envergure de Weygand était capable d’exploiter malgré l’infériorité des moyens.

Seule la seconde contre-offensive est encore possible(en direction d’Abbeville) : Weygand dispose de 3 divisions blindées dont celle commandée par le colonel De Gaulle, qui bénéficie des chars les plus redoutables pour l’époque. Pour une fois nos troupes ont une supériorité matérielle et pourtant ce fut un désastre. Nous sommes le 28 mai 40, la division du colonel De Gaulle est reconstituée après l’échec dispendieux de la bataille de Moncornet que De Gaulle fera passer dans ses mémoires pour un génial acte d’héroïsme (141 blindés détruits sur 219 dont 22 chars lourds, imperméables aux canons antichars, et que les usines françaises commencent à produire).

La veille De Gaulle arrive à bord de sa limousine, rédige ses instructions pour ses responsables de Corps ; il a réfléchi en voiture à son plan de bataille, il est sûr de lui, ne consulte personne et refuse avec arrogance les observations du général Delestraint. Rapidement les unités se perdent (De Gaulle avait refusé l’utilisation du téléphone de campagne), les chars basculent dans les chemins creux, tombent de falaises ; la pagaïe est générale. Ce qui n’empêche pas De Gaulle de télégraphier à Paul Reynaud (encore président du Conseil) pour lui annoncer la victoire pour le lendemain. La général Delestraint devant le désastre donne l’ordre du repli. De Gaulle mortifié part en voiture sur Paris : il voit d’abord son tailleur (Paul Reynaud vient de le nommer général à titre temporaire) puis Paul Reynaud auquel il explique pour se couvrir que la responsabilité du désastre incombe à Weygand (ce qui est totalement faux).

Deux jours après Paul Reynaud nomme De Gaulle secrétaire d’Etat à la Guerre, qui pourra jouer les stratèges de salon. La conclusion de ces évènements déplorables c’est que De Gaulle est inapte à l’action sur le terrain et au commandement. A noter que dans le même temps le général de La Font qui combattra dans son char de commandement (et non dans sa limousine) connait des heures glorieuses et contribuera à freiner et désorganiser l’avance allemande. De Gaulle qui se targuera plus tard d’être « l’inventeur » de la guerre de chars a en fait dans ses rapports plagié l’ouvrage du général Estienne datant de 1924.

 


Le départ pour Londres

Là encore la légende dorée du gaullisme voudrait que De Gaulle ait refusé l’armistice et gagné Londres pour continuer le combat. Qu’en est-il ? Paul Reynaud, encore président du Conseil des ministres charge De Gaulle d’une mission confidentielle auprès de Churchill. Paul Reynaud envisage de partir à Alger ou Casablanca avec son gouvernement. Mais tout va très vite dans ce genre de « sauve qui peut » des politiques et Paul Reynaud démissionne le 16 juin. Le Maréchal Pétain accepte de prendre la présidence du Conseil et forme un nouveau gouvernement. De Gaulle constatant qu’il ne fait plus partie de ce gouvernement décide de rester à Londres (après un aller et retour à Bordeaux où s’est replié le gouvernement de Paul Reynaud fuyant les allemands). De Gaulle réussit à prendre la parole à la radio de Londres et invite les militaires français et les ingénieurs civils à le rejoindre à Londres. C’est le fameux « appel du 18 juin » que peu de personnes entendent et dont le texte officiel devenu objet du culte gaulliste ne sera élaboré qu’au mois d’aout 40. Churchill, premier ministre britannique, accepte d’abriter en Grande Bretagne De Gaulle et son maigre entourage qui se fait appeler « les français libres » ; mais Churchill se méfie de lui et l’écarte de toutes les discussions.

Le 3 juillet à la stupéfaction générale les anglais attaquent la Flotte française dans la rade de Mers el Kébir (Algérie) après un ultimatum anglais sommant les navires français de rejoindre l’Angleterre. Cet ultimatum étant refusé par l’amiral Gensoul (afin de respecter les clauses de l’armistice), les anglais bombardent la Flotte française et font 1300 morts parmi les marins français. Ces évènements dramatiques vont détériorer les relations entre le gouvernement français et les anglais (auquel on associe De Gaulle).

 


Les coups de force des gaullistes

Peu de personnes rejoignent De Gaulle à Londres et les motivations de ceux qui s’y rendent sont très variables, qu’il s’agisse de civils ou de militaires. De Gaulle va « annexer » les soldats réchappés des combats de juin 40 dans la Somme (ceux qui ont embarqué avec les anglais à Dunkerque) ainsi que les commandos qui ont mené avec les anglais l’opération sur Narvik en Norvège, enfin les bretons qui avec les pêcheurs ont préféré se réfugier en Angleterre lors de l’arrivée des allemands.

Le capitaine de Hauteclocque est un des rares militaires français à rejoindre De Gaulle à Londres. Il prend le nom de Leclerc et De Gaulle le nomme commandant pour l’envoyer dès le 6 aout 40 (avec quelques civils dont René Pleven) faire basculer l’Afrique Noire française dans le giron gaulliste : Brazzaville(Congo), Fort Lamy(Tchad), Douala(Cameroun). Pour ces coups de force politiques les gaullistes s’appuient sur les colonies anglaises voisines et pour avoir plus d’autorité Leclerc se nomme colonel.

Les Anglais après s’être opposés à la demande de De Gaulle d’une expédition militaire sur Dakar (territoire français) y consentent et fournissent la logistique. Le 23 septembre 40, le gouverneur général de Dakar n’accepte pas ce coup de force et défend la colonie française. Il s’ensuit des combats, des morts et un cuirassé britannique gravement atteint. Les anglo-gaullistes doivent faire demi-tour. Echec cuisant pour De Gaulle (qui avait fait croire à la présence de sous-marins allemands à Dakar) vivement critiqué par l’opinion anglo-saxonne et par Roosevelt qui parle de guerre civile.

Leclerc quant à lui poursuit son action en Afrique et avec quelques troupes locales qu’il a mises sous son commandement s’empare de Libreville (colonie française), le 10 novembre 40, puis décide d’attaquer l’oasis de Koufra en Lybie tenue par les italiens qu’il réussit à chasser de cette position en février 1941.

De Gaulle projette de s’emparer de la Syrie et du Liban qui sont sous protectorat français. Les anglais y sont opposés mais un mouvement nationaliste en Irak (soutenu par les allemands) fait craindre aux anglais pour leur ravitaillement en pétrole. Churchill accepte une expédition franco-britannique sur la Syrie, attaquée le 8 juin 1941. Comme à Dakar des français tirent sur des français. Après 5 semaines de combats et 2000 morts, un armistice est signé.

Le 22 juin 1941, Hitler envahit l’URSS ; De Gaulle décide immédiatement d’exprimer son soutien aux soviétiques et se fait reconnaître par Moscou comme gouvernement légal de la France ; ceci prépare le « ralliement » des communistes et facilitera l’arrivée au pouvoir en 1945 de 5 ministres communistes dans le gouvernement français. La fin de l’année 41 est marquée par l’entrée en guerre des américains (après l’attaque de la base navale de Pearl Harbour par les japonais).

 


Les rapports avec les alliés et l’élimination des gêneurs

Churchill joue plusieurs cartes et notamment le gouvernement légitime de la France (conversations secrète avec Pétain et Weygand) puis avec le général Catroux que Churchill voudrait voir à la place de De Gaulle pour prendre la tête des « forces françaises libres ».

Roosevelt quant à lui ne veut pas entendre parler de De Gaulle (pas de militaire prenant la tête d’un gouvernement d’une France libérée) et entretien des contacts avec le gouvernement français à Vichy où il envoie l’amiral Leahy comme ambassadeur officiel et en Afrique du Nord où il délègue le diplomate Murphy qui soutiendra le général Weygand par l’envoi de ravitaillement et de matériel militaire.

Roosevelt considère que l’Afrique du nord est son « domaine réservé » et tient à l’écart du débarquement de 1942 en AFN, De Gaulle et les FFL. Il traite avec Darlan, haut-commissaire du gouvernement français pour l’Empire et qui a sous ses ordres l’armée française (dite « armée d’Afrique ») reconstituée par Weygand et commandée par le général Juin.

Après l’assassinat de Darlan, le général Giraud, récemment évadé des prisons allemandes (et qui a le soutien confidentiel de Pétain) arrivé en Afrique du Nord est désigné comme commandant en chef des armées françaises de l’Empire par les gouverneurs (nommés par « Vichy ») de l’Algérie, Maroc, Tunisie et Afrique Noire. Les américains « entérinent »cette désignation et traitent avec Giraud.

De Gaulle est fou de rage d’être ainsi tenu à l’écart par les américains. Pour « calmer le jeu » Roosevelt organise la conférence d’Anfa (AFN) pour mettre autour d’une table De Gaulle et Giraud ; ce qui ne règle pas les problèmes car De Gaulle n’a plus qu’un objectif : éliminer Giraud. De Gaulle commence par marginaliser Giraud en lui laissant les opérations militaires (notamment le débarquement en Italie) avant de le « mettre en touche » définitivement par une suite de « coups fourrés ».

De Gaulle et ses « hommes de main », hommes politiques prêts à toutes les basses œuvres pour conquérir le pouvoir, vont s’employer à éliminer les gêneurs que sont les représentants légaux de la France (et qui par loyauté et cohérence se refusent à entrer dans le jeu gaulliste). Toute cette phase essentielle qui se déroule après le débarquement américain en AFN est fort bien décrite par Claude Paillat dans « L’échiquier d’Alger ». Christophe Nick dans son ouvrage « Résurrection », paru en 1998, dit clairement que l’ordre de supprimer Darlan a été donné de Londres.

Paul Dangler, chef prestigieux d’une résistance réelle et efficace dès 1940 en Alsace, rencontre à cette époque De Gaulle à Alger. Désirant rester indépendant il s’attire la colère de De Gaulle qui cherche à le liquider dans des accidents dont on ne peut bien sûr prouver le commanditaire.

De Gaulle fait mettre en touche le général Juin, qui vient de s’illustrer brillamment à la tête de l’armée française (« l’armée d’Afrique »), dans la reconquête de l’Italie et veut poursuivre le combat contre l’armée allemande au-delà de Rome. Camarade de st Cyr, tutoyant De Gaulle, le général Juin avait refusé « l’appel du 18 juin » et ce qu’il appelle les « outrances verbales » de De Gaulle. Juin s’attache avec Weygand à mettre sur pied une véritable armée française (qui atteindra 300 000 hommes), apte à combattre aux côtés des Alliés. De Gaulle ne lui pardonnera jamais son « légalisme », il en sera de même pour le général de Lattre de Tassigny (pourtant gaulliste de cœur) mais qui après son évasion des prisons « françaises » rejoint, à la demande de Giraud, l’Afrique du Nord et succède au général Juin à la tête de l’armée française pour le débarquement de Provence et le combat contre l’armée allemande jusqu’en Alsace et au-delà.

En mai 1943, De Gaulle crée le CNR (Comité National de la Résistance) et marginalise définitivement Giraud (excellent stratège militaire et meneur d’hommes mais inapte politiquement, accumulant les bévues et les maladresses), De Gaulle « s’impose » en chef de Gouvernement. Le 4 avril, De Gaulle « achève » Giraud en le relevant de son commandement de l’armée française et le nomme inspecteur général des armées, ce que Giraud ne peut que refuser. Relégué en AFN, Giraud reçoit une balle dans la nuque d’un tirailleur « mal inspiré » qui sans lui ôter la vie, lui ôte ses dernières illusions.

De Gaulle mobilise toute son énergie et celle de son entourage pour éliminer tous ceux qui peuvent lui « faire de l’ombre » et pour disqualifier le gouvernement légitime de la France, l’appelle le « gouvernement de Vichy » ou « Vichy » tout court. De Gaulle ne cherchera à aucun moment à dissocier ceux qui faisaient le jeu des allemands, par opportunisme ou par conviction (comme Laval) de ceux qui ont sauvé la France (comme le maréchal Pétain malgré ses défauts , son grand âge et ses décisions inadmissibles à partir de 1942) et surtout de ceux qui ont constitué la véritable résistance à l’occupant et préparé la reconquête (comme Weygand qui sera jeté en prison à la Libération). Tous furent mis « dans le même sac » et quand ils ne furent pas éliminés physiquement (comme Darlan) furent écartés à jamais de toute vie politique et sociale.

 


Les mouvements de résistance

François Grossouvre, conseiller privilégié de François Mitterrand, dira « c’est la gauche qui a exploité la Résistance mais ce sont les gens de droite qui l’ont créée ». La véritable résistance à l’occupant n’est pas à Londres mais en France et tout d’abord à partir du gouvernement légal du maréchal Pétain qui en négociant l’armistice a permis de délimiter une « zone libre » sur le territoire métropolitain mais aussi de garder l’ensemble de l’Empire français libre de toute occupation allemande et enfin de pouvoir conserver pour la défense de l’Empire une armée de 100 000 hommes.

Le général Weygand est peut-être le plus glorieux résistant à l’occupation allemande, lui qui a tout tenté militairement jusqu’à l’armistice et qui ensuite va reconstituer en Afrique du Nord une véritable armée qui atteindra 200 000 hommes (300 000 avec la mobilisation des européens d’Afrique du Nord, les seuls à être mobilisés pour la libération de la France, De Gaulle ne prenant jamais cette décision sur le sol métropolitain après le débarquement en Normandie ce qui pourtant aurait permis d’intégrer dans l’effort de guerre et la légalité le cas des FFI et des FTP). L’armée reconstituée par Weygand, équipée dès 1942 par les américains et que l’on appelle « l’armée d’Afrique », va participer glorieusement aux combats : en Tunisie dès novembre 42 pour repousser l’armée allemande du général Rommel, puis la libération de la Corse, en Italie avec les terrible combats du mont Cassino où seule l’armée française réussira à percer les défenses allemandes et enfin pour la libération de la France proprement dite avec le débarquement de Provence en août 1944.

Sur le territoire français métropolitain, dès le début de l’occupation allemande une « organisation de résistance armée »(ORA) est mise en place par le général Frère (avec l’accord secret de Pétain) au sein de l’armée ou à partir de militaires démobilisés après l’armistice. A travers tout le territoire des groupes se constituent, plus ou moins spontanément, généralement isolés les uns des autres : activités d’espionnage, camouflage d’armes, aides aux évadés (il ne faut pas oublier que les allemands ont fait deux millions de prisonniers), secours aux personnes recherchées par la gestapo. Plus tard les juifs « étrangers » qui n’avaient pas quitté à temps le territoire occupé vont bénéficier de l’aide de ces réseaux et ultérieurement les juifs de nationalité française quand Vichy accepte de prendre des mesures contre eux de regroupement (la plupart des juifs pourront heureusement se cacher en zone libre).

Le premier français à constituer un vaste réseau organisé et discipliné est l’alsacien Paul Dangler. Autre initiative importante et dès 1940 celle d’Henry Fresnay. Tous sont des gens de droite et catholiques convaincus. Au départ tous les réseaux avaient une existence clandestine et discrète, sans provocations envers l’occupant allemand ; le but est avant tout la collecte de renseignements pour les Alliés et la protection des personnes recherchées par la police allemande. Mais après l’entrée de l’armée allemande en URSS tout va changer : Moscou demande aux communistes français de livrer une guérilla sans merci à l’occupant.

Le 21 aout 1941, un chef communiste, ancien des brigades rouges espagnoles, abat un officier allemand dans le métro. C’est le départ d’un engrenage d’assassinats et de représailles allemandes sur des innocents pris en otage. Les actions de cette résistance aux ordres de Moscou sont totalement inconsidérées et provoquent la mort inutile de milliers d’innocents. Bon nombre de réseaux prennent hélas modèle sur les méthodes des FTP (Francs- Tireurs et Partisans, aux ordres de Moscou).

Fin décembre 41, Jean Moulin, ancien préfet de Chartres, prend contact avec De Gaulle à Londres. En janvier 42 il repart en France avec mission d’unifier tous les mouvements de résistance autour de De Gaulle et cela dans l’objectif de la prise du pouvoir politique après la libération du territoire par les Alliés.

La position de De Gaulle était extrêmement simple : quiconque n’avait pas répondu à son appel ou n’acceptait pas de se mettre sous son autorité (tant civils que militaires) était traitre à la France. Tous les français qui avaient accepté le gouvernement français replié à Vichy, c’est-à-dire la très grande majorité des français et notamment l’ensemble des fonctionnaires qui continuaient de faire fonctionner la France, appliquant pour beaucoup les directives avec discernement (on oublie par exemple les fonctionnaires qui fournissaient des faux papiers aux résistants, les policiers qui facilitaient la fuite des juifs recherchés etc.), tous ces français étaient considérés comme des « collabos »des allemands. Car en réalité, malgré les énormités et les mensonges proférés à la radio de « Londres » et les appels à la désertion bien peu de français, civils ou militaires, rejoindront la « France Libre » de De Gaulle, préférant pour les plus courageux gagner l’Afrique du Nord et l’armée française légale.

Jean Moulin va donc sur le sol français imposer l’unification des mouvements de résistance au profit des gaullistes ; peut-être en réalité des communistes car il semble vraisemblable aujourd’hui que jean Moulin était un agent double, travaillant aussi pour Moscou. Les mouvements de résistance (souvent les plus anciens et les plus efficaces) qui avaient gardé leur indépendance (essentielle en réalité pour leur sauvegarde) doivent passer sous l’autorité des gaullistes, de gré ou de force. Curieusement ceux qui voudront garder leur indépendance seront livrés à la Gestapo par des dénonciations dont on peut craindre la provenance. Ce qui sera semble-t-il fatal à Jean Moulin, pris à son propre piège et arrêté par les allemands en juin 43.

Les mouvements de résistance gaullistes (Forces Françaises de l’Intérieur, FFI) et communistes (FTP) qui gardent en réalité leur indépendance et continuent d’obéir aux consignes de Moscou, suscitent la création de « maquis » (ce qui constitue une folie dans la France occupée) et se préparent à déclencher la « guérilla » au moment où les Alliés débarquent en France (plus dans l’objectif de prendre le Pouvoir que d’aider les Alliés).

Le recrutement des maquis s’effectue souvent parmi ceux qui ne veulent pas répondre à la convocation des allemands pour le STO (Service du Travail Obligatoire, imposé par l’occupant, s’effectuant généralement en Allemagne) et qui veulent se cacher. Cependant beaucoup de jeunes courageux préfèrent les « chantiers de jeunesse » mis en place par « Vichy » (formation para-militaire) qui ensuite réussissent pour certains à rejoindre l’armée française en Afrique du nord.

 


Les mésalliances gaullistes pour la prise du pouvoir

En dehors des communistes, De Gaulle fait alliance avec tous les ramassis de la IIIème République, socialistes, radicaux et autres francs-maçons qui s’étaient enfuis en juin 40, cachés durant l’occupation, réapparaissant à la Libération : les communistes tout d’abord dont les principaux comme Maurice Thorez étaient réfugiés à Moscou, sans parler de Georges Marchais qui en 1939 ira travailler en Allemagne comme volontaire dans les usines d’aviation Messerschmit, mais aussi beaucoup de socialistes notamment Vincent Auriol, réfugié pendant toute l’occupation dans un hospice des Pyrénées et qui deviendra le Ier président de la IV république.

Peu avant le débarquement en Normandie De Gaulle transforme le CNR en « gouvernement provisoire de la république française » pour occuper la place dès le départ des allemands, sachant qu’il pourra faire éliminer les gens du « gouvernement de Vichy » par la résistance sous le prétexte global de collaboration avec les allemands. A noter que De Gaulle ne s’investira jamais dans les tâches concrètes comme la libération de la France de l’occupation allemande ou la survie des populations. Son seul objectif sera la politique : la prise du pouvoir avec l’équipe qu’il a constitué (passée maître dans la propagande, tant pis pour les mensonges). Les coups de bluff lui réussiront.

De Gaulle fou de rage de n’être averti du débarquement en Normandie qu’au dernier moment refuse de fournir aux Alliés les 135 guides français et la 2éme DB de Leclerc ne rejoint le sol français qu’au mois d’aout au Mans pour la fin de la bataille de Normandie. Il n’y aura aucune « force française libre » le 6 juin sur les plages normandes. Le commando Kieffer (177 « français libres ») débarquent à Ouistreham sous les ordres des Alliés ; De Gaulle feint d’en ignorer l’existence et poursuivra cette attitude sa vie durant.

Il faut aussi savoir que le président des Etats-Unis a longtemps eu l’intention de préserver l’autorité légitime du maréchal Pétain lors de la libération du territoire français et en dernier ressort de faire administrer la France par des services américains prévus à cet effet (comme pour l’Italie). Après le débarquement anglo-américain sur les côtes normandes, Jean Daujat, se précipite chez le maréchal Pétain à Vichy et lui demande instamment de prendre un avion pour Bayeux, seule ville libérée. Le maréchal n’y était pas opposé, malgré ses 88 ans, mais personne ne fut capable de réaliser ce projet audacieux. Dommage car c’était les troupes américaines qui tenaient Bayeux et De Gaulle n’avait toujours pas été autorisé par les Alliés à se rendre en France. De Gaulle doit en effet attendre la mi-juin pour se rendre à Courseulles (14) où il arrive en bateau très discrètement. De Gaulle et son équipe sont très inquiets de l’accueil qu’ils vont recevoir ; son équipe se charge de « manœuvrer »la population et à son arrivée à Bayeux l’histoire retiendra qu’il est acclamé. Paradoxalement De Gaulle repart aussitôt à Londres pour ne revenir en France que fin aout.

En aout 44 les allemands emmènent Pétain et Laval prisonniers en Allemagne. Le « gouvernement provisoire »initié par De Gaulle se trouve maitre d’une France où l’ordre continuait d’être assuré par l’administration. Les responsables qui à tous les niveaux avaient permis à la France de survivre pendant l’occupation, sont déclarés traîtres à la Patrie (on se croirait en 1789) et accusés sans discernement de collaboration.

Alors que la libération de la France n’est pas terminée et que la guerre dure encore près d’un an, les FFI et FTP, au lieu de s’intégrer à l’armée des Alliés pour continuer le combat contre les allemands, vont « épurer »le pays. Et pour empêcher les américains de prendre contact avec les autorités légitimes de la France, De Gaulle se hâte de gagner Paris où il arrive le 25 aout précédé d’une partie de la division Leclerc qui « fausse compagnie » aux Alliés pour mener le jeu politique de De Gaulle. Les FFI et FTP, dont beaucoup endossent le brassard FFI au dernier moment, s’emparent partout du pays dans une guérilla ostentatoire et inutile mais qui leur permettra, les armes à la main, d’occuper tous les postes administratifs.

De Gaulle nomme les préfets dans les départements libérés par les Alliés mais laisse se constituer des tribunaux populaires qui jugent en toute illégalité : assassinats, emprisonnements, tortures visent toutes les personnalités non-communistes. Le « colonel » FTP Ravanel, mis en place par Jean Moulin, répandra la terreur dans le Midi et même le Sud-ouest ; un correspondant de guerre américain chiffre le bain de sang à 50 000 victimes civiles pour cette seule région.

Ce n’est que le 28 octobre 1944 que les milices des soi-disant résistants sont dissoutes et remplacées par des tribunaux administratifs officiels qui se montreront néanmoins d’une partialité et d’une injustice tout aussi incroyable. Volonté manifeste d’abattre toute opposition aux gaullistes et aux socialo-communistes. On ne peut chiffrer le nombre exact de victimes de « l’épuration » sauvage et officielle : entre 100 000 et 200 000 peines de mort et pour des centaines de milliers de personnes l’emprisonnement, l’indignité nationale avec confiscation des biens ; toute l’élite française est décapitée et le pays paralysé. Ceci en dehors des véritables collaborateurs des allemands qu’il était nécessaire de juger et de condamner.

Le 13 novembre 1945 De Gaulle est élu président du gouvernement provisoire de la République à l’unanimité des 556 votants à l’assemblée nationale. Socialistes et communistes détiennent la majorité (302 députés sur 586). Thorez, déserteur en 40, revenu de Moscou reprend sa place au PC devenu le premier parti de France. De Gaulle en fait un ministre d’Etat. La présence de 5 ministres communistes dans le gouvernement est probablement le prix que doit payer De Gaulle pour que Moscou donne ordre aux FTP de « rentrer dans le rang ».

Mais De Gaulle ne s’entend pas avec les députés et le 20 janvier 1946 il donne sa démission et rentre chez lui. Attitude caractéristique d’un personnage qui se révèle tout au long de sa vie incapable de composer pour gouverner. Paradoxe d’un personnage (et de son entourage) frustrés de ne pas avoir gardé les rênes du pouvoir. Les intrigues et les coups fourrés reprennent avec plusieurs tentatives de putsch « légal » ; l’utilisation des « évènements » d’Algérie aboutit après le 13 mai 1958 au retour du général aux commandes de la France jusqu’à son départ en 1969 où, comme en 1946, vexé et désavoué il retourne chez lui.

Une meilleure connaissance de l’Histoire et notamment du personnage machiavélique de De Gaulle aurait permis d’éviter à la France bien des drames et au moins de ne pas participer au retour du général en 1958 où il fut appelé comme sauveur du pays , tout aussi bien par les cadres de l’armée que par la droite française (alors que tous les écrits de De Gaulle et son comportement passé montraient qu’il bradait l’Empire colonial et faisait en tous domaines une politique incohérente et suicidaire pour la France).

A noter qu’en Afrique du Nord, durant la seconde guerre mondiale, le prestige du maréchal Pétain, vainqueur des allemands en 14-18, restait très fort chez les européens tout autant que chez les arabes dont beaucoup avaient servi dans l’armée française sur tous les champs de bataille ; De Gaulle ne leur pardonnera pas et leur fera chèrement payer en livrant, en 1962, l’Algérie aux mains des seuls terroristes du FLN.

Une meilleure connaissance de l’Histoire aurait permis et permet encore aujourd’hui de rendre justice à ceux qui ont réellement servi la France (comme Weygand, Giraud et tant d’autres) et de rester clairvoyant sur les « idoles » pour lesquelles il serait honnête d’être au moins plus nuancé : ne serait-ce que pour Leclerc, honoré comme un modèle par la droite catholique alors que l’on passe sous silence Juin et de Lattre de Tassigny pourtant plus glorieux sans parler du général de Montsabert, grand vainqueur de Cassino, totalement oublié; que dire d’autre part de Jean Moulin, autre « idole », agent de Moscou ?, au parcours pour le moins ambigu, enfin Malraux mythomane farfelu et tant d’autres (comme le couple Aubrac) dont il importerait de clarifier le véritable comportement. Le devoir de mémoire reste une obligation morale.

 

D. Roussel Pour Stageiritès

 


 

Livres que l’on peut utilement lire sur ce sujet :

Le temps des compromis, mai-décembre 1940, Philippe Prévost, éd CEC 2005

De Gaulle, la grandeur et le néant, Dominique Venner, éd du Rocher 2004

Réplique à l’amiral de Gaulle, Henri-Christian Giraud, éd du Rocher, 2004

De Gaulle et les communistes, Henri-Christian Giraud, éd Albin Michel, 1988

Au cœur de la résistance alsacienne, le combat de Paul Dungler, Jean Eschbachh, éd J. Do Bentzinger 2003

Résurrection, naissance de la Véme république, un coup d’État démocratique, Christophe Nick, éd Fayard 1998

L’échiquier d’Alger, tome 1 et 2, Claude Paillat, éd Laffont 1967

Le général Estienne, père des chars, colonel Ramspacher, Lavauzelle 1983

En lisant les mémoires de guerre du général De Gaulle, Maxime Weygand, éd Flammarion 1945